Je me sens un peu désemparée. Une sensation désagréable que l'avenir de m'appartient pas. Je me sens objet, objet rouillé, objet cassé, dans l'incapacité d'être utilisé à bon escient.
Je ne maitrise plus ce désir de grossesse, je ne maitrise plus la création de mon enfant, je ne maitrise plus rien. Je suis. Je bois les mots, les paroles des médecins, j'observe, je réfléchis, je ne sais plus quoi faire.
Les choix sont trop difficiles, à l'opposé de ce que moi je voudrai, trop loin de mes rêves d'enfants, trop loin de mes désirs de femme. Je ne veux pas d'une pipette, ni d'un traitement, je ne veux pas avoir mal, je ne veux pas être disponible. Je ne veux pas qu'on m'examine, ni qu'on me traite comme si mon corps était incomplé, dans l'incapacité de fonctionner. Je veux juste un enfant. Un tout petit, je veux juste ce que la nature offre avec simplicité, sans artifice, je veux vivre cette grossesse universelle, qu'on soit pauvre ou riche, noir ou blanc, je veux rejoindre ce groupe de femmes nauséeuses et fatiguées, moi aussi je veux donner la vie, simplement, sans médecine.
Nous sommes si nombreuses à déambuler dans ce couloirs sans fin, et pourtant je me sens extra-terrestre, inhumaine. Comme si, parce que je suis une femme dans l'incapacité d'enfanter naturellement, je n'avais pas ma place dans cette société trop bien rangée.
J'ai mal. Mal avant même d'avoir mal. Je crève de douleur et d'incompréhension, d'injustice et de jalousie. Je ne sais plus quels choix je dois faire: continuer à croire en ce bébé couette pour qui on se bat depuis presque quatre longues années, ou renoncer en laisser mon corps et celui de Sébastien à la médecine.
Je n'y crois plus. Je suis désarticulée, spectatrice de ma propre chute, de ma propre défaite. On me le rappel, on me le crit, on me l'hurle, "la seule solution maintenant c'est les fécondation in vitro, madame. On peut essayer une insémination artificielle avant si vous le désirez", les mots me violente et détruise le peu de féminité que je possède, je suis perdue, je ne désire ni la FIV ni l'IAC. Ce n'est pas la seule solution, c'est impossible. Je ne peux y croire.
Je suis dans l'incapacité d'entendre ce qu'on a me dire, dans l'incapacité de voir ce corps qui ne fonctionne pas et de comprendre que, maintenant, je n'ai plus reellement de choix: la medecine est mon seul espoir.
"Le véritable échec c'est lorsqu'on ne persévère pas"